En avril 2014 nous tombions amoureux. De toi. De ton ouverture sur le monde. Des secrets que tu savais garder. Des visions que tu nous offrais pour l’avenir.
A cette époque, je quittais une maison nichée dans un angle de rue, à la croisée symbolique de ma vie d’alors. Bertrand et moi te cherchions depuis un an, quand la magie d’une rencontre t’a mis sur notre chemin. Nous t’avons aimé, choyé, pendant 6 belles années. Grâce à toi j’ai goûté à la puissance de l’énergie d’un lieu, à sa capacité d’être le théâtre et l’acteur des plus belles réussites, comme des difficultés les plus lourdes. Tu te souviens des 6 premiers mois de notre vie commune ? Tous mes projets qui s’annulaient, s’effondraient. Le néant. L’incompréhension totale pour moi. Jusqu’à ce que je plonge dans une pratique de l’expertise des lieux plus subtile. Que j’apprenne que, depuis 1969 date de ta naissance, aucune famille n’était venue vivre chez toi par hasard. Que le premier occupant s’appelait…Bertrand. Que certaines des énergies nichées près de mon bureau étaient d’une puissance de destruction redoutable, si on ne prenait pas le temps d’écouter les messages qu’elles délivraient. Qu’il allait falloir que je fasse preuve de beaucoup de patience. Et d’humilité.
Une seule question au lendemain du jour où nous t’avons vendue à d’autres : ai-je réussi ?
Ton chi, cette énergie qu’on ne voit pas à l’œil nu, mais que notre corps perçoit, m’a nourrie au-delà de mes espérances. Associé à ton ADN parfois très lourd à porter, j’ai pu au cours de cette dernière année chez toi, prendre conscience que mes fractures et expériences de vie s’articulaient toujours autour d’une même date. Septembre. Du 17 au 20. Beaucoup de décès concentrés sur ces seuls jours, et un secret familial révélé cette année, me libérant ainsi du fardeau de la fatalité.
Grâce à toi j’ai aussi fait l’expérience d’aimer un homme en essayant de ne rien attendre en retour. J’ai appris à aimer ce qu’il me donnait, plus que ce qu’il ne me donnait pas. Tu m’as ainsi autorisé à grandir, à devenir une femme complète, à libérer l’enfant intérieur de son héritage. Tu m’as guidé. Les chiffres de ton ADN, déposés soigneusement sur chacune de tes pièces, m’ont fait découvrir la puissance nichée dans ce bureau que tu m’avais offert. Dans cet espace ouvert sur le jardin et son potager, mes capacités à trouver des lieux uniquement par le pouvoir de la pensée ont pris forme sous mes yeux. C’est dans cet espace précieux de création que j’ai senti le moment venu de transmettre mon parcours et mon expérience, à des femmes et des hommes engagés et passionnés par l’envie de faire bouger les consciences en s’appuyant sur l’énergie des lieux pour déployer une activité.
2020 avec toi aura aussi été l’arrivée de nouvelles trajectoires de création professionnelle. Celle du portrait documentaire tissé avec Origin Om Made et la talentueuse Krystal Turcan. Un subtil et mystérieux travail dont le contenu m’a fait grandir et murir au fil des images et des échanges. L’envie de rassembler mon intérieur pour le partager, démystifier et ancrer la spiritualité dans le monde pragmatique et cartésien. Une aventure qui prend forme et verra le jour hors de tes murs.
Cette année c’est aussi mon intervention pour Utopia Hacker, en tant que retourneur de conscience pour une grande entreprise leader du monde agroalimentaire. Une expérience qui m’a fait me sentir comme en préparation de l’oral du Bac, une impression grisante de sortir totalement de ma zone de confort.
Je me souviendrai du confinement, passé chez toi, dans tes trois étages pour nous trois. Quel immense cadeau tu nous as offert là. De l’espace à ne plus savoir qu’en faire, des respirations permanentes grâce à tes immenses baies vitrées, tes deux jardins décalés et complémentaires. La paix nécessaire qu’il me fallait pour laisser exploser ma colère devant l’injustice apparente de cette séparation amoureuse, puis le temps nécessaire pour la laisser retomber, la voir cicatriser. Et parvenir enfin à pardonner. Totalement. Accueillir l’autre, et moi par effet miroir, dans nos nouvelles vies en devenir.
Et pour finir, tu as su attirer à toi les futurs propriétaires, ceux qui eux aussi ont une histoire à écrire avec toi. Cet acquéreur dont la date de naissance n’est autre que celle de la date de ma rencontre amoureuse avec Bertrand. Le 26 mai. Ce nouveau propriétaire dont le lieu de naissance, est Saint Denis de La réunion, la terre de naissance de mon père, une terre dont je suis tombée amoureuse il y a 9 ans.
Enfin, je n’oublierai jamais ce soir de juin, où tu auras accueilli chez toi Gaëlle, celle qui est venue m’offrir mon lieu d’accueil temporaire, d’où je t’écris aujourd’hui. Une maison surnommée par sa propriétaire « la maison du bonheur », nichée près d’une église et de son jardin orné de vignes. Dont la famille était venue se reconstruire ici elle aussi, puis avait retrouvé l’amour, et pris son envol pour un nouveau nid.
Bien sur j’ai été triste de te quitter, mais je me suis sentie étrangement libérée, légère. Car chez toi je me sentais comme dans une tour d’ivoire, assise sur ton escalier central vertigineux, sur trois niveaux, installée sur les hauteurs loin de la ville, proche de la forêt et … loin de la vie. Je redescends vers le cœur de ville cette fois, au centre de la vie humaine, avec plein de voisins déjà accueillants. Je te laisse mes rêves vécus et transformés de famille réunie et recomposée, ceux de la petite Anne de 8 ans. Et j’emmène grâce à toi l’ancrage de la femme rassemblée et réunie, de toutes ces poupées russes intérieures qui façonnent notre existence.
L’heure est venue d’aller écrire une nouvelle histoire ailleurs.